Voici donc comment on s’y prend en Sibérie pour faire démarrer un camion un jour de "moroz" (glacé-surglacé, en clair, moins de -30°C). La réalité dépasse le mythe !
Nous avons ainsi passé 10 jours dans la forêt à débiter des troncs en petites planches. Bien entendu, je me suis essayé, non pas à la tronçonneuse, ma seule tentative ayant abouti à la rupture de la chaîne, mais à la langue altaïenne. Il en ressort que des progrès certains sont à faire dans les deux disciplines ! Mais la motivation est là !
Nous logions dans une petite isba chauffée par un petit poële que chaque soir nous faisions rougir pour la nuit.
Isolés à une quinzaine de kilomètres de toute habitation, nous n’avions pour seule compagnie la journée, que les oiseaux et la tronçonneuse. Une fois la nuit venue, le pesant silence retombait sur la forêt et ne laissait place ponctuellement qu’au lointain hululement du loup (ça fait frémir, non ?). De fait, quinze kilomètres, ça ne paraît pas beaucoup, mais avec des températures constamment inférieures à -10°C, de la neige profonde, des loups et des ours alentours, il est tout de même préférable de se déplacer en engin à moteur. Enfin, je veux dire qu’il est préférable que ledit engin fonctionne !
Étant donné que nous étions obligés de nous arrêter toutes les 15 minutes pour remettre de l'eau dans le radiateur percé, qu'il fallait avoir prévu une pente pour repartir sous peine de devoir donner de la manivelle (franchement pas simple, et il est certain que mes biceps ont pris de l'ampleur), qu'il fallait parfois dégonfler les pneus pour franchir un col (pneus qui, pour la plupart heureusement, se regonflaient automatiquement. Il fallait alors faire preuve d'une certaine clairvoyance pour choisir quels pneus dégonfler !), le doute planait quant à la possibilité d'une nuit à la fraîche ! Et si nous transportions à l'arrière du camion moults seaux et baquets pour faire fondre de la neige en cas d'arrêt prolongé, nous préférions tout de même aller briser la glace d'une rivière pour chercher de l'eau.
Voici donc le fier camion de l’armée recyclé grâce auquel cet improbable périple a été possible...
Et voici de quoi on a l’air quand il fait -30°C…